L'exploration urbaine, c'est quoi ?

L'exploration urbaine, plus communément appelée "urbex", est une pratique consistant à explorer et à photographier des lieux cachés, interdit d'accès, souvent abandonnés, parfois pas. Il peut s'agir d'anciennes habitations, comme des manoirs, des châteaux ou même de simples maisons, des sites industriels, des centres hospitaliers, des édifices religieux, des cimetières de voitures, et tant d'autres...

L’expression "exploration urbaine" a été popularisée à la fin des années 90' par le canadien Jeff Chapman, connu sous le pseudonyme Ninjalicious. Dans son fanzine Infiltration, il détaillait les techniques pour, entre autres, contourner la sécurité, s'infiltrer dans des zones militaires, etc.,  et évoquait déjà les différentes règles de l'urbex.

Fortement mis en avant grâce à YouTube et aux réseaux sociaux ces dernières années, et bien qu'interdite, cette pratique attire de plus en plus d'adeptes, malheureusement pas tous respectueux des lieux... Le respect est pourtant l'une des règles fondamentale de l'urbex.
Thermes Multicolores (France, 2021).

Les règles de l'urbex

Les règles fondamentales de l'exploration urbaine sont simples, et malheureusement pas assez respectées par tout le monde, donnant une mauvaise image aux explorateurs passionnés, respectueux et dévoués à la préservation des lieux que nous explorons...
  • Garder les adresses secrètes : Les débutants et les non-pratiquants ne comprennent pas toujours pourquoi nous refusons de partager les localisations des spots que nous explorons. Si nous gardons secrètes toutes ces adresses, c'est pour une seule et bonne raison : éviter qu'elles ne tombent entre de mauvaises mains. Comme je vous l'ai précisé plus haut, il n'y a pas que les photographes passionnés qui s'aventurent entre les murs de ces lieux délaissés... Trop de lieux se dégradent à une vitesse faramineuse. Vols, tags, traces de squats, départs de feux, mobiliers abîmés, parois et vitres détruites, en bref tout ce qui enlève l'âme du lieu... C'est tout ceci que nous tentons d'éviter, ou du moins de repousser au maximum. La seule chose que nous laissons "dégrader" ces lieux, c'est le temps, qui fait très bien son travail tout seul.
  • Ne pas rentrer par effraction : Pour une question juridique d'une part, et pour le respect du lieu d'autre part. En effet, le simple fait de pénétrer dans une propriété privé, parce que oui tous ces lieux sont des propriétés privés, n'est pas puni par la loi (attention ne pas confondre avec violation de domicile, rentrer dans le domicile d'autrui sans y être invité est passible d'un an de prison et de 15.000 € d'amende). Si l'explorateur respecte l'ensemble des règles, il n'encoure pas grande chose. En revanche, rentrer par effraction, tout comme dégrader, piller ou voler, peut vous conduire au tribunal, et vous l'aurez bien mérité.
  • Ne pas dégrader : Beaucoup trop de gens confondent les urbexeurs (ceux qui pratiquent l'urbex) et les casseurs, les pilleurs... Comme je vous l'ai dit, l'image des explorateurs respectueux est dégradée à cause de comportements irrespectueux de certaines personnes. La plupart du temps ce sont des bandes de jeunes voulant se montrer intéressants devant leurs camarades. Rare sont les urbexeurs qui dégradent les spots, cette règle est bien connue et la plupart du temps respectée. Pourtant certains photographes n'hésitent pas à piller certaines pièces dans l'objectif d'avoir des clichés uniques, et irréalisables par les prochains explorateurs (ah oui certains vont loin...). 99 % des casseurs sont des jeunes vivants à proximité des lieux abandonnés, on ne fait pas des centaines de kilomètres dans le but de vandaliser des lieux, si c'était notre but on le ferait près de chez nous !
  • Ne rien voler : Une règle beaucoup trop négligée... Ramener un souvenir de notre journée urbex, ça peut être tentant. Rien qu'un petit objet, ça ne se verra même pas, et puis je ne ferai de tord à personne, qui s'en soucie ? Très bonne mentalité bravo ! Si tout le monde faisait pareil, il ne resterait plus grand chose dans les spots... Ramener avec soit n'importe quel petit objet sans valeur, sans importance, ça s'appelle du vol, et le vol c'est puni d'un an d'emprisonnement et de 45.000 € d'amende.
  • Être prudent : Explorer des sites désaffectés, des cavités souterraines ou monter sur les toits, c'est bien, mais c'est dangereux. Certains lieux abandonnés, laissés à la merci des éléments, peuvent menacer de s'effondrer, et même si ils ne le paraissent pas forcément toujours. Les sites industriels sont sans aucun doutes les plus dangereux, c'est pas pour rien si on paye des gardiens pour les surveiller. Chaque année des explorateurs se blessent ou se tuent dans ces lieux... Faites très attention où vous mettez les pieds, et ne prenez aucun risque inutile. Ça serait dommage de revenir à la maison dans une boite. Si possible, n'explorez jamais seul (enfin ça, c'est à vous de voir).
Je ne sais pas qui a rédigé ces règles, mais il est bon de les respecter, pour le bien des lieux que nous explorons, et pour permettre aux prochains explorateurs de trouver les lieux dans le même état que nous les avons trouvé.
Château Anamorphose (France, 2018).

Trouver des spots d'urbex

Je ne ferai pas ici l'apologie des échanges, bien trop nombreux, qui enlèvent le charme à cette pratique et dénaturent bon nombre de spots, tombés entre de mauvaises mains (cf. règle n°1)Si vous voulez trouver des spots d'urbex, des lieux abandonnés inédits, des lieux inconnus de la plupart des autres urbexeurs, il y a plusieurs étapes :

Installez-vous confortablement, vous risquez de rester assis un moment. Allumez votre ordinateur, et ouvrez Google Maps. Assurez-vous d'avoir une bonne connexion Internet, avoir une map qui ne charge pas à chaque fois que vous zoomez ou bougez le curseur, ça va bien 2 minutes mais ça va vite vous passer l'envie de chercher... Quadrillez la carte aux alentours de chez vous, ou plus loin si vous n'avez pas peur de faire des kilomètres.

  • En zone rurale, repérez les zones boisées, voyez si vous ne trouvez pas de toits dépasser de cette végétation. Vus du ciel, les maisons, manoirs et autres châteaux à l'abandon sont assez vite reconnaissables. Ils sont bien souvent entièrement entourés de végétation, cette dernière ayant recouvert le bitume et les graviers. Il arrive que les parcs de certains spots soient toujours entretenus, et sont donc moins facilement repérables. Si vous avez un doute, notez la localisation et allez vérifier directement sur place. Attention à ne pas pénétrer dans un lieu habité !
Vue satellite du Château Sécession, avant l'incendie qu'il a subit en 2018 (Le Quesnel, France).
  • En zone urbaine, les sites industriels et les hôpitaux désaffectés sont les plus simples à trouver. Cherchez les gros bâtiments, ils font souvent tache dans le paysage, c'est entre autres pour ça que les villes souhaitent se débarrasser de ces "verrues" assez vite. Il est facile de différencier une usine abandonnée et une usine simplement fermée parce que la photo a été prise un dimanche. Pour ce qui est des hôpitaux, ils ne s'arrêtent jamais, c'est encore plus facile à distinguer. Les parkings vides, les voitures laissent place à la végétation qui pousse dans les fissures du bitume. Il n'est pas rare que les spots urbains soient ou aient été squattés, vandalisés, ce qui laisse des traces souvent visibles en vue satellite, un bon moyen de repérer ces spots, mais aussi un bon moyen de savoir qu'ils ne sont plus dans leur meilleur état...
Vue satellite de la friche de la Rhodiaceta, avant sa démolition en 2018 (Besançon, France).

Qui donne leurs noms aux spots ?

Il n'est pas rare qu'un même spot ait plusieurs dénominations, chacun étant libre de donner le nom qui semble le mieux définir le spot qu'il vient d'explorer. Ainsi le même château va se voir renommé "Château Roger Andermatt", " Château Peter Pan", "Château Parapluie", ou encore "Château Escalade".
Château Roger Andermatt (France, 2018).
Bien souvent, le nom le plus utilisé reste l'un des premiers qui lui a été donné, ou celui utilisé par un explorateur un peu plus connu dans le milieu de l'urbex. Un certain nombre de spots sont connus sous des noms de tueurs en séries. Ces derniers sont baptisés par Laurent Soler, aka Urbex Session, un urbexeur originaire du sud de la France, qui prend un malin plaisir à rédiger des histoires sordides dans chacun des articles qu'il publie sur son site internet.

Cependant, la majorité des spots sont baptisés par des explorateurs moins connus, sans qu'on ne sache réellement qui les a surnommé ainsi. Moi-même il m'arrive de donner des noms aux spots que j'explore, soit parce que je n'ai jamais vu de photos de ces lieux auparavant, soit pour donner une touche personnelle. Certains noms que j'ai donné sont d'ailleurs repris par d'autres explorateurs, comme l'"Institut Charles Darwin", l'"Hôpital Silencieux" ou encore le "Château Mystère" (aussi connu sous le nom "Château Kingdom"). Il est possible que certains articles présentent des spots que vous connaissez sous d'autres noms, alors pas de panique, c'est normal !

La plupart du temps, les noms proviennent d'un objet trouvé dans le lieu. Par exemple le "Château Gramophone" tient son nom du phonographe présent dans le salon du château. Les noms peuvent aussi être un clin d’œil à la localisation du spot, ainsi la Roche du Diable a donné son nom à la "Clinique du Diable". L'historique du lieu, une architecture atypique, un accès compliqué, dangereux ou encore le contexte dans lequel se déroule l'exploration peut aussi être à l'origine du nom des spots.
Château Gramophone (France, 2019).
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